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PRÉSENTATION DU FONDS
Référence : CHT044/ IS TRIPODE
Intitulé : Fonds de l’intersyndicale amiante Tripode Beaulieu Nantes
Dates extrêmes : 1967- ...
Niveau de description : Fonds
Importance matérielle : Le fonds est composé de 89 articles représentant un métrage d’1,80 ml. Il contient à la fois des documents écrits, iconographiques (plan), des photographies et une banderole.
Nom du producteur : Intersyndicale amiante Tripode Beaulieu Nantes
NOTICE HISTORIQUE
A la fin des années 1960, un transfert de services centraux de l’Etat est organisé vers les grandes villes de France. Nantes devient la ville des « fichiers ». Le ministère de la Justice y place une partie de la gestion des casiers judiciaires. On y retrouve également une partie des archives diplomatiques et des fichiers des personnes nées à l’étranger. A cette époque, l’INSEE commence à s’informatiser et le but est de « centraliser la gestion des grands répertoires » avec le fichier Sirene, le Répertoire national d’identification des personnes physiques et le fichier électoral. Le Trésor Public, dans le même mouvement, entend concentrer au niveau régional ses services de paie, installer un service de liaison-recouvrement, un centre de gestion des retraites et procéder à une informatisation de ces missions.
Pour répondre à son projet, le ministère des Affaires Étrangères lance en 1966-1967 la construction d’un immeuble. Budgétairement le projet s’enlise, la tour est alors financée en partie par le ministère des Finances pour l’INSEE (CNI, CNE, Observatoire économique de l’Ouest et Études régionales) et le Trésor public. En 1968, ce bâtiment de 18 étages, dénommé immeuble inter-administratif « Beaulieu tripode », est inauguré en présence et avec un discours de Michel Debré, alors ministre des Affaires étrangères, promouvant la politique de décentralisation portée par le président de la République Charles de Gaulle. L’objectif à atteindre est la « réconciliation entre Paris et la province ».
L’ensemble du personnel administratif s’installe dans la tour en 1972. À cette occasion l’INSEE recrute 400 personnes.
Dans les années 1970, l’utilisation de l’amiante est fortement restreinte aux États-Unis, c’est en Europe que le marché va se développer.
A partir des années 1975-1976, les syndicats de l’INSEE commencent à mettre en lumière le problème de l’amiante, mais c’est à partir de 1980 que l’on parle réellement des dangers de l’amiante. Les personnes constatent « le flocage amianté des plafonds », l’utilisation de l’amiante comme coupe-feu à différents endroits . Il y a une prise de conscience de la présence de l’amiante à l’INSEE et le personnel commence alors à s’organiser en intersyndicale pour la dénoncer. L’intersyndicale n’a pas de statut juridique. Il s’agit d’une union syndicale organisée pour se mobiliser ou mener des actions contre l’amiante. Il n’y a donc pas de date de création légale, mais son premier tract date de 1978. Elle tient des assemblées générales, mais ne réunit pas de groupes de travail ni de commissions.
Par ailleurs, les syndicats du ministère des Affaires étrangères, de l’INSEE et du Trésor public s’organisent pour demander la création d’un Comité d’hygiène et de sécurité. Aux Finances, c’est en 1989 qu’est créé le Comité d’hygiène et de sécurité ministériel (CHSM) et les comités d’hygiène et de sécurité départementaux interdirectionnels (CHS-DI). Le CHS va permettre d’exprimer les inquiétudes à propos de l’amiante, portées auparavant par les syndicats auprès du Conseil de gestion d’immeuble. Le CHS concerne uniquement les salariés qui dépendent du ministère de l’Économie et des finances.
Compte-tenu de la présence d’amiante et de mobilisations des personnels, le ministère des Finances décide l’évacuation du Tripode qui se déroule entre 1992 et 1993. Les agents sont dispersés à plusieurs endroits dans Nantes. Les agents de l’INSEE se retrouvent sur le site d’Atlantica, les agents du Trésor Public investissent des locaux anciennement destinés à IBM et les agents du ministère des Affaires étrangères sur le site de Breil Malville . Après le déménagement, les syndicats dispersés dans Nantes prennent la décision de continuer à traiter le dossier ensemble à travers l’Intersyndicale Tripode. En 1995 à la mort de l’électricien Maurice Concher, l’intersyndicale se mobilise activement pour la reconnaissance des maladies professionnelles et le versement d’une indemnisation aux ayant-droits.
La démolition du Tripode annoncée par la communauté urbaine de Nantes décide l’Intersyndicale à réclamer au tribunal administratif de Nantes une expertise qui lui est accordée en 2002. La destruction du Tripode désamianté a lieu le 27 février 2005.
Trois études épidémiologiques portant sur les effets de l’amiante sur ses anciens occupants ont été réalisées entre 2006 et 2015 à la demande des syndicats.
En 2008, les salariés du Tripode sont les premiers exposés non professionnels à bénéficier en France d’un scanner de contrôle. 2008 marque également l’obtention de l’imputabilité de la « reconnaissance de maladie professionnelle » et celle également du « cancer larynx et ovaire ».
En 2015, c’est le Tripode qui justifie la loi sur la pré-retraite amiante des fonctionnaires.
La dernière phase en 2019 a permis de faire reconnaître le « préjudice d’anxiété » basé sur une double faute de l’Etat, employeur et législateur. Sur 160 personnes, 150 ont perçu une indemnisation. Les agents exposés au sein des bureaux sont les premiers bénéficiaires, en France, à avoir été exposés indirectement puisqu’ils ne manipulaient pas l’amiante. Ils ont été indemnisés entre 2000 et 7000 euros.
En 2017, l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) refuse de reconnaître la tour Beaulieu Tripode comme site amianté, donc la faute de l’État n’est pas reconnue.
L’intersyndicale constitue « l’Association documentaire Tripode » en 2008 afin de produire un documentaire. Ce film vise à mettre en lumière l’histoire du Tripode, mais surtout le combat et les préjudices subis par les personnes ayant travaillé dans le Tripode.
Chaque syndicat désigne un membre siégeant au conseil d’administration de l’association. Catherine de Grissac, réalisatrice, s’est chargée de trouver une société de production. L’association a permis de lever des fonds pour faire le film. Les demandes de financement sont adressées et aboutissent auprès du conseil régional, départemental, de Nantes métropole, du ministère des Affaires étrangères et de l’INSEE. Par la suite les droits du film ont été vendus à l’INSEE et aux Affaires étrangères. En 2015, l’association devient « Association solidarité Tripode » afin de gérer le financement d’actions de solidarité pour les agents du Tripode.
Historique de la conservation :
Les archives ont dans un premier temps été conservées dans les locaux syndicaux du Tripode et par les militants, y compris après le déménagement de la tour en 1992 dans leurs nouveaux locaux de travail.
Certains militants ont également conservé des archives à leur domicile, qui ont ensuite été intégrées au fonds avant le dépôt au CHT.
Modalité d’entrée :
Le fonds a été déposé au Centre d’histoire du travail de Nantes en 2018. Francis Judas, membre CGT de l’Intersyndicale du Tripode s’est occupé du transfert de ces archives.
PRÉSENTATION DU CONTENU DU FONDS
Les archives du fonds de l’intersyndicale du Tripode représentent essentiellement l’activité militante des syndicats CGT, CFDT, FO, Solidaires, CFTC et ASAM-UNSA au sein de ce collectif et sont de nature très diverse. Certains documents se sont retrouvés dans le fonds après des départs à la retraite, mais également au moment de l’évacuation des archives syndicales de l’INSEE, car elles allaient être détruites. Ce sauvetage s’explique par la « prise de conscience de l’intérêt et de l’importance des archives » par l’intersyndicale : elle garde des traces, plus qu’un autre collectif, car ces archives servent de preuves notamment pour la reconnaissance des maladies professionnelles. Les dossiers constitués avant le dépôt ont été faits de manière à ne pas différencier les syndicats, et représenter l’activité de l’intersyndicale comme une unité. De ce fait l’instrument de recherche ne différencie par les syndicats, on distingue cependant certaines personnes ayant constitué leurs dossiers de leur côté et qui les ont confiés à l’intersyndicale.
C’est le cas de Marie-Claude Villeneuve, membre CFDT puis CGT de l’intersyndicale, qui a confié pour l’histoire ses archives, contenues dans un dossier et deux classeurs. Ces archives sont pour le moment conservées dans leur conditionnement d’origine, l’archiviste Manuella Noyer envisage cependant dans le futur de les reconditionner pour une meilleure conservation. Il y a également Renée-Luce Marchalot, membre CFDT puis CGT de l’intersyndicale, qui se distingue également par ses dossiers dans le fonds.
Différentes typologies sont représentatives du fonds, parmi les principales : les procès-verbaux et comptes-rendus de réunion, les coupures de presse, les photographies, les tracts, les courriers, les courriels, des articles scientifiques. Beaucoup de documents ont été collectés afin de constituer des preuves pour faire reconnaître le préjudice subi.
Évaluation, tris et éliminations, sort final :
Les doubles ont été éliminés du fonds, il s’agit : d’un guide méthodologique « diagnostic et traitement des flocages à base d’amiante » du groupe de travail du comité permanent amiante, un tract, un document « dotation habillement personnel », une pétition vierge, un article de la revue acier Stahl Steel, deux comptes-rendus du CHS-DI (juillet-octobre 2004), un procès-verbal de la réunion du CHS-DI (1er juillet 2004). Le reste du fonds a été conservé dans son intégralité.
Accroissements :
Le fonds de l'Intersyndicale du Tripode est un fonds ouvert car l’Intersyndicale est toujours active. Nous avons connaissance d’archives numériques qui n’ont pas encore été confiées au CHT, mais qui le seront peut-être dans quelques années. Le CHT est également disposé à récupérer de nouvelles archives papier.
MODE DE CLASSEMENT
Le classement a été organisé suivant les modèles de plan de classement fournis par l’archiviste Manuella Noyer concernant les archives syndicales et associatives. L’objectif a été de refléter l’activité de l’Intersyndicale à travers deux grandes thématiques :
- Activités
- Information-communication
Le fonds n’a pas de partie sur le fonctionnement de l’Intersyndicale car ce collectif n’est pas une entité juridique structurée.
CONDITIONS D'ACCES ET D'UTILISATION
Juridiquement le fonds de l’Intersyndicale amiante Tripode Nantes, est un fonds d’archives privées. La communication du fonds est libre, sauf pour certains documents pouvant porter atteinte au secret médical (25 ou 120 ans), à la protection de la vie privée (50 ans) et aux dossiers portés devant les juridictions (100 ans). Les documents concernés par les délais de communicabilité ont été anonymisés dans l’instrument de recherche. Toutefois, compte-tenu du nombre important de données personnelles contenues dans l’ensemble des documents composant ce fonds, un contrat d’engagement de confidentialité rappelant la législation et la réglementation concernant la protection des données personnelles sera signé par la chercheuse ou le chercheur souhaitant consulter ce fonds.
Condition de reproduction :
Les reproductions des documents d’archives sont libres à condition de respecter les délais de communicabilité. Le CHT met à disposition un photocopieur et un scanner à cet effet.
Langue et écriture des documents :
L’ensemble des documents du fonds sont en français, à l’exception de certains articles scientifiques concernant l’amiante qui sont en anglais.
Caractéristiques matérielles et contraintes techniques : L’ensemble du fonds est en bon état de conservation.
Instrument de recherche :
Répertoire numérique détaillé du fonds IS TRIPODE, fait en juin 2022 par Clara Chabot stagiaire archiviste. Le répertoire numérique détaillé peut être consulté sur le site internet du CHT.
SOURCES COMPLÉMENTAIRES
Existence et lieu de conservation des originaux :
Les originaux du fonds IS TRIPODE sont conservés au Centre d’histoire du travail.
Sources complémentaires :
Sources complémentaires conservées au CHT :
- Fonds du syndicat CGT de la Direction régionale INSEE des Pays de la Loire.
- Fonds du syndicat CGT du Centre national d’exploitation INSEE.
- Fonds de la section syndicale CFDT du Centre nationale d’exploitation INSEE.
- Archives d’Edmond Chailleux, praticien hospitalier chef de service de pneumologie du CHU de Nantes, concernant les effets de l’amiante sur l’appareil respiratoire et ses controverses (1970-2010).
Sources complémentaires conservées aux Archives départementales de Loire-Atlantique :
- Fonds de la Direction régionale des Finances publiques (DRFIP) : 2651W22
- Direction départementale de l’Équipement (DDE), fonds photographiques et audiovisuels du service : 2216W12, 2216W16.
- Fonds de la Préfecture, gestion des services administratifs : 2041W2, 2451W17-18, 2755W23-31.
Sources complémentaires conservées aux Archives nationales du monde du travail :
- Fonds du Syndicat national de la Confédération générale du travail (CGT) de l’Institut national de la statistique et de l’étude économique (INSEE) et du Groupe des écoles nationales d’économie et statistique (GENES).
Bibliographie :
- DEVINCK, (Jean-Claude), « Amiante : trente ans de luttes institutionnelles 1945-1977 », dans Annie Thébaud-Mony, sous la dir. de, Santé au travail : approches critiques, La Découverte, 2012, p. 281-312.
- HENRY (Emmanuel), Amiante : un scandale improbable, sociologie d’un problème public, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2007, 312 p.
- INSEE, Cinquante ans d’INSEE ou la conquête du chiffre, INSEE, Paris, 1996, 220p.
- Collectif intersyndical sécurité des universités-Jussieu CFDT, CGT, FEN, danger, amiante !, éditions la découverte, Jussieu, 1977, 420 p.
- Le bulletin de l’ANDEVA (Association nationale de défense des victimes de l’amiante) : sortie biannuel, information sur l’activité des associations et nationales.
Cette description a été faite par Clara Chabot, stagiaire archiviste sous la direction de Manuella Noyer, archiviste au CHT.
Règles ou conventions Cette description a été réalisée suivant la règle ISAD(G) établie par le conseil international des Archives (ICA) en 1994.
Date(s) de la description : 20 juin 2022
PLAN DE CLASSEMENT
IS TRIPODE 1-80 ACTIVITÉS
IS TRIPODE 1 ACTIVITÉ DE L’INTERSYNDICALE DANS LES ANNÉES 1980
IS TRIPODE 2-25 ACTIVITÉ ANNUELLE DE L’INTERSYNDICALE
IS TRIPODE 26-30 ARCHIVES DE RENÉE-LUCE MARCHALOT
IS TRIPODE 31-33 ARCHIVES DE MARIE-CLAUDE VILLENEUVE
IS TRIPODE 34-40 TRIPODE ET AMIANTE
IS TRIPODE 34-39 Construction du Tripode
IS TRIPODE 40 Destruction du Tripode
IS TRIPODE 41-43 CONSEIL DE GESTION DE L’IMMEUBLE INTER-ADMINISTRATIF
Sécurité de l’immeuble Beaulieu
IS TRIPODE 44-47 RECONNAISSANCE DES MALADIES PROFESSIONNELLES
IS TRIPODE 44-45 Preuves documentaires
IS TRIPODE 46-47 Dossiers particuliers sur les victimes de l’amiante
IS TRIPODE 48-65 AMIANTE ET SANTÉ
IS TRIPODE 48-59 Santé au travail
IS TRIPODE 60-61 Guides méthodologiques
IS TRIPODE 62-64 Études épidémiologiques
IS TRIPODE 65 Expertise
IS TRIPODE 66-78 COMITÉ D’HYGIÈNE ET DE SÉCURITÉ
IS TRIPODE 66-68 CTP-CHS
IS TRIPODE 69-78 CHS-DI de Loire-Atlantique
IS TRIPODE 79-80 MOBILISATIONS
IS TRIPODE 81-89 INFORMATION, COMMUNICATION
IS TRIPODE 81-82 PRESSE /REVUE
IS TRIPODE 83 DOCUMENTAIRE
Une tour, de l'amiante, un combat
IS TRIPODE 84-89 ICONOGRAPHIE, OBJET
IS TRIPODE 84-86 Travailler dans le Tripode
IS TRIPODE 87 Expertise
IS TRIPODE 88-89 Manifestations |